Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 4 juillet 2013, 12-21.842, Publié au bulletin

Presiding JudgeMme Flise
ECLIECLI:FR:CCASS:2013:C201144
Case OutcomeRejet
Docket Number12-21842
Appeal Number21301144
CounselMe Ricard,SCP Rocheteau et Uzan-Sarano
Date04 juillet 2013
CourtDeuxième Chambre Civile (Cour de Cassation de France)
Publication au Gazette officielBulletin 2013, II, n° 151

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 9 mai 2012), que M. Joseph X... et ses soeurs, Mmes Pauline Y..., Marie-Thérèse Z... et Madeleine Z... (les consorts Z...-X...) ont chacun souscrit auprès de la société Cardif assurance-vie (l'assureur) des contrats d'assurance sur la vie libellés en francs et en unités de compte, dont ils ont confié la gestion à une autre société qui, le 20 février 2004, a investi dans la société d'investissement à capital variable de droit luxembourgeois Luxalpha American selection B (Sicav Luxalpha) ; qu'à la suite de la révélation des fraudes commises au sein de la société de Bernard A...à laquelle la Sicav Luxalpha confiait la totalité de ses actifs, le cours de cette dernière a été suspendu le 15 décembre 2008, puis sa liquidation judiciaire ordonnée le 2 avril 2009 ; que le 17 novembre suivant, les consorts Z...-X... ont assigné l'assureur devant un tribunal de commerce pour obtenir sa condamnation à substituer aux unités de compte de la Sicav Luxalpha des unités de compte de même nature et à verser sur chaque contrat un montant équivalent au total des unités de compte substituées ; que Mme Madeleine Z... étant décédée en cours d'instance, M. Dominique Z..., son mari, ainsi que MM. Bruno, Geoffroy, Ghislain et Gilles Z..., et Mmes Bénédicte, Blandine, Agnès et Aude Z..., leurs enfants, ont repris volontairement l'instance ;

Attendu que les consorts Z...-X... font grief à l'arrêt de les débouter de l'ensemble de leurs demandes, alors, selon le moyen :

1°/ que le souscripteur d'un contrat d'assurance-vie doit, à tout moment au cours de l'exécution du contrat, être en mesure de connaître sa valeur afin de pouvoir effectuer les arbitrages de son choix entre les différentes unités de compte pouvant servir de support au contrat, ou bien d'en solliciter le rachat en espèces ou en nature ; qu'il s'ensuit qu'en cas de disparition, au cours de l'exécution du contrat, de l'unité de compte servant de support au contrat, l'assureur doit lui substituer une autre unité de compte de même nature ; qu'il y a disparition d'une unité de compte lorsque la détermination de sa valeur est devenue impossible, ainsi donc que l'exécution et la réalisation du contrat à la demande de l'assuré dans les conditions et délais prévus par le code des assurances ; qu'au cas d'espèce, la cour d'appel a constaté que la valeur nette d'inventaire de la Sicav Luxalpha n'était plus publiée ni connue depuis le 17 novembre 2008, et que cela entraînait une impossibilité de valorisation des contrats litigieux, affectant l'exécution de ces contrats ; qu'en décidant pourtant que les unités de compte constituées par les titres de la Sicav Luxalpha n'avaient pas disparu, quand il ressortait de ses propres constatations que la valeur de ces unités n'était plus connue déterminable depuis plus de trois ans, de sorte que les contractants et les bénéficiaires du contrat étaient dans l'impossibilité de valoriser leurs contrats et que l'assureur était corrélativement dans l'incapacité d'exécuter les contrats dans les conditions et délais exigés par le code des assurances, la cour d'appel a violé les articles L. 131-1, L. 132-21, R. 131-1, R. 332-2 et A. 131-1 du code des assurances, ensemble les articles 1134, 1189 et 1190 du code civil ;

2°/ que dans le cadre d'un contrat d'assurance-vie exprimé en unités de compte, le contractant ou le bénéficiaire est en droit d'opter, au dénouement du contrat, pour un règlement en nature consistant en la remise de titres ou de parts par l'assureur ; qu'il s'ensuit que l'impossibilité de valoriser les titres servant de support à l'unité de compte, ainsi que de les acquérir ou de les céder, faisant obstacle à l'exécution et à la réalisation du contrat dans les conditions et délais prévus par le code des assurances, emporte disparition de l'unité de compte au sens de ce code, et oblige l'assureur à opérer la substitution de l'unité ainsi disparue ; qu'au cas d'espèce, il résulte des propres constatations des juges du fond que les titres de la Sicav Luxalpha ne pouvaient plus être acquis ni cédés, avec pour conséquence que l'assureur n'était plus en mesure-, depuis plusieurs années-, d'exécuter son obligation de règlement en cas d'option des contractants pour un rachat par remise des titres servant de support à l'unité de compte ; qu'en décidant néanmoins que ces circonstances ne caractérisaient pas une disparition des unités de compte ayant pour support les titres de la Sicav Luxalpha, justifiant la mise en oeuvre de l'obligation de substitution pesant sur l'assureur, les juges du fond ont, à cet égard encore, violé les articles L. 131-1, R. 131-1, R. 332-2 et A. 131-1 du code des assurances, ensemble les articles 1128, 1134, 1189 et 1190 du code civil ;

3°/ que les unités de compte sont constituées de valeurs mobilières ou d'actifs offrant une protection suffisante de l'épargne investie ; que dès lors, quand les unités de compte d'un contrat d'assurance-vie sont constituées de titres d'une société de droit étranger, elles doivent être considérées comme ayant disparu dès l'instant où une décision prise par les autorités de cet Etat a rendu les titres en constituant le support, insusceptibles de faire l'objet d'une opération juridique ; qu'au cas d'espèce, en retenant au contraire que la circonstance que l'autorité de marché luxembourgeoise ait retiré la Sicav Luxalpha de la liste officielle des organismes de placement collectif, dès lors qu'elle ne respectait plus les exigences du droit luxembourgeois, n'était pas susceptible de caractériser une disparition de l'unité de compte, les juges du fond ont violé les articles L. 131-1, R. 131-1 et R. 332-2 du code des assurances, ensemble les articles 3, 6, 1128, 1134 et 1837 du code civil ;

4°/ que l'impossibilité pour le souscripteur du contrat d'assurance-vie de connaître déterminer la valeur de l'unité de compte dans laquelle est d'ores et déjà exprimé son contrat, et dont la valorisation conditionne tout le fonctionnement, caractérise une disparition de l'unité de compte, et non pas une simple inéligibilité ; qu'en effet, l'inéligibilité, qui n'implique en soi aucune impossibilité intrinsèque de valoriser l'unité de compte rendue inéligible, ni aucun dysfonctionnement rédhibitoire inhérent à cette unité, s'entend simplement de l'impossibilité pour le souscripteur du contrat d'effectuer un arbitrage vers une unité rendue indisponible, c'est-à-dire de choisir de valoriser tout ou partie de son contrat en fonction de cette unité qui n'en constituait pas déjà le support ; qu'en l'espèce, en considérant, pour écarter l'existence d'une disparition de l'unité de compte ayant pour support la Sicav Luxalpha, que l'impossibilité d'en déterminer la valeur dans les circonstances de l'espèce, constituait un simple cas d'inéligibilité, les juges du fond ont violé les articles L. 131-1 et R. 131-1 du code des assurances ;

5°/ que le souscripteur d'un contrat d'assurance-vie libellé en unités de compte n'accepte pas, en souscrivant un tel contrat, d'assumer le risque de ne pouvoir, de manière durable, valoriser son contrat ni en demander la réalisation dans les conditions et délais fixés par le code des assurances, en raison d'une impossibilité de valorisation de l'unité de compte ; qu'au contraire, en prévoyant l'obligation pour l'assureur de substituer une unité de compte de même nature en cas de disparition de l'unité de compte prévue au contrat, le code des assurances a entendu exiger de l'assureur qu'il fasse à tout moment en sorte que l'exécution du contrat ne soit pas compromise par un dysfonctionnement de l'unité de compte, et ainsi corrélativement fait peser sur lui le risque d'une telle impossibilité de remplir ses obligations au titre de l'exécution du contrat ; qu'en l'espèce, en considérant, pour dénier la disparition d'une unité de compte justifiant une substitution de la part de l'assureur, que les circonstances ressortant de ses propres constatations, suivant lesquelles la valeur de l'unité de compte ne pouvait plus être déterminée depuis plus de trois ans, ni donc le contrat s'exécuter normalement, révélaient un simple risque de fluctuation des marchés financiers devant peser sur le souscripteur, et non pas sur l'assureur, quand le risque, assumé, par les contractants, de fluctuation des marchés, n'impliquait nullement qu'ils puissent être durablement privés de leur droit de pouvoir valoriser leur contrat et d'en demander l'exécution dans les conditions et délais prévus par le code des assurances, la cour d'appel a violé les articles L. 131-1, R. 131-1, R. 332-2 et A. 131-1 du code des assurances, ensemble les articles 1104, 1134 et 1964 du code civil ;

Mais attendu que l'arrêt retient que la disparition d'une unité de compte n'est pas légalement définie ; que si les consorts Z...-X... s'attachent à démontrer que la " disparition " doit s'entendre de manière fonctionnelle, au regard de la capacité de l'unité de compte à servir de support au contrat, capacité que les unités de compte Luxalpha auraient perdu du fait qu'elles ne pourraient plus exprimer le capital garanti, ni constituer l'objet d'un dénouement par remise des titres, ces unités de compte sont constituées des titres de la Sicav Luxalpha dont la personnalité morale subsiste pour les besoins de sa liquidation jusqu'à la clôture de celle-ci, de sorte que les unités de compte qui la représentent existent toujours, elles aussi ; que la suspension du calcul de la valeur nette d'inventaire de la Sicav Luxalpha depuis le 17 novembre 2008 ne fait pas disparaître l'unité de compte lui servant de...

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