Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 14 janvier 2014, 12-16.218, Publié au bulletin

Presiding JudgeM. Bailly (conseiller doyen faisant fonction de président)
ECLIECLI:FR:CCASS:2014:SO00006
Case OutcomeCassation
CounselSCP Gatineau et Fattaccini,SCP Masse-Dessen,Thouvenin et Coudray
Appeal Number51400006
Date14 janvier 2014
Docket Number12-16218
Subject MatterCONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Cause - Cause réelle et sérieuse - Applications diverses - Manipulation frauduleuse par le salarié du chronotachygraphe - Absence de déclaration préalable du dispositif de surveillance à la CNIL - Portée UNION EUROPEENNE - Règlement (CEE) n° 3821/85 du Conseil du 20 décembre 1985 - Appareil de contrôle dans le domaine des transports par route - Equipement obligatoire des véhicules d'un chronotachygraphe - Portée UNION EUROPEENNE - Règlement (CE) n° 561/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 - Appareil de contrôle dans le domaine des transports par route - Equipement obligatoire des véhicules d'un chronotachygraphe - Portée INFORMATIQUE - Informatique et libertés (loi du 6 janvier 1978) - Traitement automatisé d'informations nominatives - Formalités préalables - Déclaration à la CNIL - Défaut - Cas - Chronotachygraphe imposé par la réglementation européenne - Portée - Informations opposables au salarié
CourtChambre Sociale (Cour de Cassation de France)
Publication au Gazette officielBulletin 2014, V, n° 4

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 4 août 1997 en qualité de chauffeur longue distance par la société Transolux, qui a été reprise par la société Transports Goubet ; que le 11 septembre 2008, il a été licencié pour faute grave après mise à pied conservatoire, l'employeur lui reprochant notamment une manipulation frauduleuse de son chronotachygraphe afin de majorer son temps de service et sa rémunération ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal de l'employeur :

Vu les Règlements CEE n° 3821/ 85 du 20 décembre 1985 et CE n° 561/ 2006 du 15 mars 2006 ;

Attendu que, pour dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que les enregistrements effectués par suivi satellitaire et chronotachygraphe des déplacements du salarié ne peuvent être opposés à celui-ci, faute de déclaration de ces dispositifs à la commission nationale de l'informatique et des libertés ;

Attendu cependant qu'en vertu du Règlement CEE n° 3821/ 85 du 20 décembre 1985, d'application directe, l'employeur est tenu, sous peine de sanctions pénales, d'assurer la mise en place et l'utilisation d'un chronotachygraphe, de sorte qu'une absence de déclaration à la Commission nationale de l'informatique et des libertés de l'emploi de cet appareil ne saurait le priver de la possibilité de se prévaloir, à l'égard du salarié, des informations fournies par ce matériel de contrôle, dont le salarié ne pouvait ignorer l'existence ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Sur le second moyen du pourvoi principal de l'employeur :

Vu l'article 624 du code de procédure civile ;

Attendu que la cassation à intervenir des dispositions de l'arrêt critiquées par le premier moyen entraîne, par voie de conséquence, celle des dispositions de l'arrêt critiquées par le second moyen, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire ;

Sur le premier moyen du pourvoi incident du salarié :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande de rappel de salaires au titre des heures supplémentaires et congés payés afférents pour les années 2004 à 2008 incluse, l'arrêt se fonde sur le décompte par quadrimestre, établi par l'employeur conformément à l'accord susvisé, de la seule année 2007 ;

Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions du salarié affirmant que l'accord d'entreprise ne lui était pas opposable ni examiner ses prétentions pour l'ensemble des années considérées, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur le second moyen du pourvoi incident :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 janvier 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze janvier deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Transports Goubet, demanderesse au pourvoi principal

PREMIER MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de Monsieur Christophe X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse, d'AVOIR, en conséquence, condamné la société la société TRANSPORTS GOUBET à lui payer les sommes de 4. 880 ¿ à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 488 ¿ au titre des congés payés afférents, 2. 408, 80 ¿ à titre de rappel de salaire pour mise à pied, outre 240, 88 ¿ au titre des congés payés afférents, 5. 813, 26 ¿ à titre d'indemnité de licenciement, 29. 280 ¿ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 1. 000 ¿ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour les frais exposés en premier instance et 1. 500 ¿ en appel, et de l'AVOIR condamné aux dépens ;

AUX MOTIFS QUE « 1. Sur le licenciement.
La lettre de licenciement notifiée à M. X... mentionnait au titre des griefs, les éléments suivants (extraits essentiels) :
- l'analyse des enregistrements de notre suivi satellitaire AGAT effectuée le 13 août 2008 pour le mois de juillet, révèle que la manipulation de vos activités et de votre chronotachygraphe est particulièrement frauduleuse : portions de temps de services injustifiés plusieurs fois par semaine, exemples 2 juillet, 4 juillet, le 8 juillet, 15 juillet, 16 juillet, 18 juillet, 23 juillet (détails des agissements reprochés précisés pour chaque jour considéré)
- infractions à la réglementation sociale : 3 juillet (infraction de temps de service journalier excessif), le 28 juillet (infraction de temps de service journalier excessif et infraction de conduite journalière excessive)
- du 28 au 29 juillet (infraction d'insuffisance de repos journalier).
- non-respect des consignes de prise de gasoil : vous faites le plein dans les stations AS 24 de Saint-Léonard, Villefranche et Langres, au lieu du dépôt de Reims (en « Ad Blue », pas en gasoil).
*Grief portant sur les enregistrements.
L'article 2 de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés dispose :
« la présente loi s'applique aux traitements automatisés de données à caractère personnel, ainsi qu'aux traitements non automatisés de données à caractère personnel contenues ou appelées à figurer dans des fichiers, à l'exception des traitements mis en oeuvre pour l'exercice d'activités exclusivement personnelles, lorsque leur responsable remplit les conditions prévues à l'article 5.

Constitue une donnée à caractère personnel toute information relative à une personne physique identifiée ou qui peut être identifiée, directement ou indirectement, par référence à un numéro d'identification à un ou plusieurs éléments qui lui sont propres. Pour déterminer si une personne est identifiable, il convient de considérer l'ensemble des moyens en vue de permettre son identification dont dispose ou auxquelles peut avoir accès le responsable du traitement ou tout autre personne.
Constitue un traitement de données à caractère personnel toute opération ou tout ensemble d'opérations portant sur de telles données, quel que soit le procédé utilisé, et notamment la collecte, l'enregistrement, l'organisation, la conservation, l'adaptation ou la modification, l'extraction, la consultation, l'utilisation, la communication par transmission, diffusion ou toute autre forme de mise à disposition, le rapprochement ou l'interconnexion, ainsi que le verrouillage, l'effacement ou la destruction.
Constitue un fichier de données à caractère personnel tout ensemble structuré et...

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