Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 20 avril 2017, 16-16.457 16-17.233, Publié au bulletin

Presiding JudgeMme Batut
ECLIECLI:FR:CCASS:2017:C100461
CitationSur le régime des décisions prises en la forme des référés en matière d'indivision par le président du tribunal de grande instance, à rapprocher :1re Civ., 15 février 2012, pourvoi n° 10-21.457, Bull. 2012, I, n° 31 (rejet), et l'arrêt cité
Case OutcomeCassation
CounselSCP Spinosi et Sureau,SCP Didier et Pinet
Date20 avril 2017
Docket Number16-17233,16-16457
Appeal Number11700461
CourtPremière Chambre Civile (Cour de Cassation de France)
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Joint, en raison de leur connexité, les pourvois n° 16-16.457 et 16-17.233 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que MM. Z... et A... Y... ont assigné, sur le fondement de l'article 815-9 du code civil, leurs frères Gabriel et Laurent, ainsi que l'UDAF de la Moselle, en sa qualité de tuteur de leur soeur Marie-Hélène, devant le président d'un tribunal de grande instance, statuant en la forme des référés, aux fins d'obtenir l'usage de différents matériels agricoles leur appartenant en indivision ;

Sur le moyen unique du pourvoi n° 16-16.457 :

Attendu que M. Gabriel Y... fait grief à l'arrêt de le condamner sous astreinte à laisser à ses deux frères l'usage de certains engins agricoles alors, selon le moyen, que chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires et avec l'effet des actes régulièrement passés au cours de l'indivision ; qu'à défaut d'accord entre les intéressés, l'exercice de ce droit est réglé, à titre provisoire, par le président du tribunal de grande instance à condition qu'il n'existe aucune contestation sérieuse ; qu'en l'espèce, après avoir relevé l'existence d'un sérieux différend opposant les indivisaires sur le possesseur, l'utilisateur des biens indivis litigieux, leur localisation, la personne privant les autres coindivisaires de leur usage et avoir tranché ces divers points, la cour d'appel, qui a néanmoins considéré qu'il n'existait aucune contestation sérieuse de sorte qu'elle était compétente pour statuer, sur appel de l'ordonnance du président du tribunal de grande instance, sur les prétentions formées par les indivisaires demandeurs, n'a pas tiré les conclusions qui s'évinçaient de ses propres constatations et a violé les articles 815-9 du code civil et 808 du code de procédure civile ;

Mais attendu que le président du tribunal de grande instance, saisi en application de l'article 815-9 du code civil, statue en la forme des référés et non en référé, de sorte que l'article 808 du code de procédure civile n'est pas applicable ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur les première et deuxième branches des cinq moyens, du pourvoi n° 16-17.233, la cinquième branche des premier et deuxième moyens, la sixième branche du troisième moyen et la troisième branche des quatrième et cinquième moyens de ce pourvoi, réunis :

Vu l'article 815-9 du code civil ;

Attendu que, pour rejeter les demandes de MM. Z... et A... Y... dirigées contre M. Laurent Y... et limiter la condamnation de M. Gabriel Y... à remettre certains engins agricoles, après avoir énoncé qu'il se déduit de l'article 809 du code de procédure civile et de l'article 815-9 du code civil que le président du tribunal de grande instance est doublement compétent pour statuer sur la réalité d'un trouble qui, s'il était avéré, serait manifestement illicite, l'arrêt retient qu'il n'est pas rapporté la preuve de la privation de leur usage imputable à M. Laurent Y... pour l'ensemble des engins litigieux et pour certains d'entre eux en ce qui concerne M. Gabriel Y... ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le président du tribunal de grande instance, saisi en application de l'article 815-9 du code civil, statue en la forme des référés et non en référé, de sorte que l'article 809 du code de procédure civile n'est pas applicable, et que, constatant l'existence d'un désaccord entre les indivisaires sur l'exercice de leurs droits d'usage et de jouissance respectifs sur les matériels agricoles indivis, il lui appartenait de régler provisoirement l'exercice de ces droits, la cour d'appel, qui a méconnu l'étendue de ses pouvoirs, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi n° 16-17.233 :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 février 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Metz ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;

Condamne MM. Gabriel et Laurent Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. Gabriel Y..., et le condamne, in solidum avec M. Laurent Y..., à payer à MM. Z... et A... Y..., la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt avril deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyen produit au pourvoi n° U 16-16.457 par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour M. Gabriel Y....

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir constaté l'absence de contestation sérieuse, d'avoir condamné M. Gabriel Y... à laisser l'usage des matériels agricoles suivants à MM Z... et A... Y... : un tracteur CLAAS modèle XERION 3800 n° 78100525, acheté le 6 mars 2008, un pulvérisateur automoteur de marque ARTEC type F40 n° 3058052, acheté le 9 décembre 2009, et un semoir VADERSTAD RDA 800 S n° 7000044, acheté le 29 octobre 2007, d'avoir dit que l'usage du tracteur et du pulvérisateur serait réservé les semaines paires à MM A... et Z... Y... et les semaines impaires aux autres coïndivisaires, d'avoir dit que l'usage du semoir serait réservé la première décade de chaque mois à M. Gabriel Y..., la deuxième décade à M. A... Y... et la troisième décade à M. Z... Y..., d'avoir ordonné qu'il soit procédé à un constat d'Huissier contradictoire entre les trois frères au moment de la remise de ces matériels afin d'attester de leur bon état de fonctionnement et d'avoir ordonné que les trois matériels précités soient mis à disposition, par M. Gabriel Y..., sur la parcelle n° [...] [...] au lieu-dit [...] à [...], sous astreinte de 1.000,00 € par jour de retard et par matériel manquant ;

Aux motifs que : « Sur la compétence du juge des référés

[
] en vertu de l'article 808 du code de procédure civile, « Dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal de grande instance peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend. » ;

Qu'en application de l'article 809 du même code : « Le président peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire. » ;

[
] qu'il résulte de l'article 815-9 du code civil que : « Chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires et avec les l'effet des actes régulièrement passés au cours de l'indivision. A défaut d'accord entre les intéressés, l'exercice de ce droit est réglé, à titre provisoire, par le président du tribunal.

L'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité. » ;

[
] que l'existence de l'obligation énoncée par cet article n'est pas sérieusement contestable à partir du moment où il ressort des pièces versées aux débats que les biens objet du litige appartiennent à l'indivision successorale entre Z..., A..., Gabriel, Laurent et Marie-Hélène Y... ;

Que, contrairement à ce que soutiennent les intimés, le juge des référés n'est pas saisi pour trancher de la propriété des matériels agricoles litigieux, ni même pour se substituer au juge du fond pour procéder au partage de ces engins agricoles entre les héritiers Y..., mais qu'il est simplement invité à statuer sur l'entrave supposée être mise par Gabriel et Laurent Y... à la faculté pour Z... et A... d'user de ces biens en violation des dispositions de l'article 815-9 du code civil précité, cette entrave pouvant causer un trouble manifestement illicite ;

[
] qu'aux termes mêmes de l'article 815-9 alinéa 2 du code civil, il est expressément prévu que le président du tribunal de grande instance est compétent pour régler à titre provisoire l'exercice du droit d'usage des biens indivis ;

Qu'il se déduit ainsi de l'article 809 du code de procédure civile et de l'article 815-9 du code civil que le président du tribunal de grande instance est doublement compétent pour statuer sur la réalité d'un trouble qui, s'il était avéré, serait manifestement illicite ;

Qu'ainsi il convient de déclarer l'action exercée par Z... et A... Y... devant le juge des référés recevable ;

Sur la réalité de l'entrave à l'usage ou à la jouissance des biens indivis

[
] qu'il résulte des pièces versées aux débats que les matériels ci-après ont été achetés en copropriété entre Z..., A..., Gabriel, Laurent et Marie-Hélène Y..., frères et soeur, et Fernande Y..., leur mère, dans les conditions suivantes :

- un tracteur CLAAS modèle XERION 3800 n° 78100525, acheté le 6 mars 2008, d'une valeur de 205 472,80 € TTC, réduite à 188 728,80 € TTC après reprise, soit 31 454,80 € par personne (pièce n° 18 des appelants) ;

- une presse CLAAS QUADRANT 3400 achetée le 12 juin 2008, d'une valeur de 23 322,00 €, soit 3 887,00 € par personne (pièce n° 18 des appelants) ;

- une moissonneuse batteuse CLAAS LEXION 580 TT n° 58602294 avec une coupe de 9 mètres n° 71609888 et un chariot quatre roues n° 719924776, achetée le 23 juin 2009, d'une valeur de 227 910,95 €, soit 37 992,76 € pour Fernande, A..., Z... et Laurent Y... et 37 969,96 € pour Marie-Hélène et Gabriel Y... (pièce n° 20 des appelants) ;

- un pulvérisateur automoteur de marque ARTEC type F 40...

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