Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 4 juillet 2018, 17-18.241, Publié au bulletin

Presiding JudgeM. Frouin
ECLIECLI:FR:CCASS:2018:SO01100
Case OutcomeCassation partielle
CounselSCP Monod,Colin et Stoclet,SCP Thouvenin,Coudray et Grévy
Subject MatterPRUD'HOMMES - Procédure - Droits de la défense - Violation - Décision se fondant uniquement ou de manière déterminante sur des témoignages anonymes POUVOIRS DES JUGES - Applications diverses - Preuve - Moyen de preuve - Matière prud'homale - Témoignages anonymes - Domaine d'application - Limite PROCEDURE CIVILE - Droits de la défense - Violation - Décision se fondant uniquement ou de manière déterminante sur des témoignages anonymes
Appeal Number51801100
Date04 juillet 2018
CourtChambre Sociale (Cour de Cassation de France)
Publication au Gazette officielBull. 2018, V, n° 136.
Docket Number17-18241
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 1er mars 2007 en qualité d'acheteur expert bâtiment par la SNCF mobilités ; que, les 4 et 5 février 2013, le salarié et Mme Z... ont saisi la direction éthique de la SNCF ; que, se fondant sur le rapport de la direction de l'éthique, l'employeur a notifié au salarié le 18 septembre 2013 une mesure de suspension et l'a convoqué devant le conseil de discipline ; qu'il a été licencié le 25 septembre 2013 ;

Sur le premier moyen et les première et deuxième branches du deuxième moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens ci-après annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le deuxième moyen pris en sa troisième branche :

Vu l'article 6, §§ 1 et 3, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Attendu que le juge ne peut fonder sa décision uniquement ou de manière déterminante sur des témoignages anonymes ;

Attendu que pour dire que la procédure de licenciement est régulière et le licenciement justifié, la cour d'appel, après avoir retenu que l'atteinte aux droits de la défense fondée sur le caractère anonyme des témoignages recueillis par la direction de l'éthique n'est pas justifiée dans la mesure où le salarié a eu la possibilité d'en prendre connaissance et de présenter ses observations, s'est fondée de manière déterminante sur le rapport de la direction de l'éthique ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le deuxième moyen, pris en sa quatrième branche :

Vu le référentiel RH00144 interne à la SNCF ;

Attendu, selon ce texte, que lorsqu'une majorité absolue de voix converge vers un niveau de sanction, ce niveau constitue l'avis du comité de discipline, il y a alors un seul avis, le directeur ne peut prononcer une sanction plus sévère ; que lorsqu'aucun niveau de sanction ne recueille la majorité des voix, le conseil a émis plusieurs avis. Dans ce cas, il y a lieu de tenir compte des avis émis par le conseil pour déterminer une majorité, ou tout au moins le partage des avis en 2 parties ; que pour ce faire, les voix qui se sont portées sur la plus sévère des sanctions s'ajoutent à l'avis ou aux avis du degré inférieur qui se sont exprimés, jusqu'à avoir 3 voix ; que le directeur peut prononcer une sanction correspondant à l'avis le plus élevé ainsi déterminé ;

Attendu que pour dire le licenciement du salarié justifié, l'arrêt retient que le conseil de discipline s'est prononcé à égalité pour et contre le licenciement, soit trois voix pour et trois voix contre, et dans les mêmes conditions pour un dernier avertissement avec une mise à pied de douze jours et un déplacement, que compte tenu des avis exprimés par le conseil de discipline, le directeur pouvait donc prononcer la sanction correspondant à l'avis le plus élevé, à savoir le licenciement ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que le directeur ne pouvait prononcer un licenciement, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le troisième moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 17 mars 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ;

Condamne la SNCF mobilités aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 3 000 euros à M. X... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre juillet deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que M. X... n'a pas fait l'objet d'une mesure discriminatoire, de l'AVOIR en conséquence débouté de sa demande de nullité du licenciement et de la mise à pied conservatoire ainsi que de sa demande de réintégration et de paiement d'une indemnité au titre des salaires perdus pendant la période allant du licenciement à la date de sa réintégration ou, subsidiairement d'une indemnité pour licenciement nul outre le versement de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi ;

AUX MOTIFS propres QUE sur la nullité du licenciement et de la mise à pied, l'article L. 1132-1 du code du travail précise qu'aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, qu'aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation ou identité sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou en raison de son état de santé ou de son handicap ; que selon l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses mesures d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, constitue une discrimination directe la situation dans laquelle, sur le fondement de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie ou une race, sa religion, ses convictions, son âge, son handicap, son orientation ou identité sexuelle, son sexe ou son lieu de résidence, une personne est traitée de manière moins favorable qu'une autre ne l'est, ne l'a été ou ne l'aura été dans une situation comparable ; que constitue une discrimination indirecte une disposition, un critère ou une pratique neutre en apparence, mais susceptible d'entraîner, pour l'un des motifs mentionnés au premier alinéa, un désavantage particulier pour des personnes par rapport à d'autres personnes, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un but légitime et que les moyens pour réaliser ce but ne soient nécessaires et appropriés ; que la discrimination inclut : 1° Tout agissement lié à l'un des motifs mentionnés au premier alinéa et tout agissement à connotation sexuelle, subis par une personne et ayant pour objet ou effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant ; 2° Le fait d'enjoindre à quiconque d'adopter un comportement prohibé par l'article 2 ; que l'article L. 1134-1 du code du travail prévoit que lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, qu'au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination et que le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; que pour fonder sa demande de nullité, M. Charles X... invoque la dénonciation d'attaques racistes à l'encontre de deux ses collègues, Mmes A... et B... ; qu'il vise la pièce n° 5 qui concerne les propos dénoncés par Mme A... dans le courriel du 23 octobre 2012 ; qu'en l'espèce, dans ce courriel, Mme A... a informé Mme Z..., sa responsable hiérarchique, que la veille, alors qu'elle prenait un café avec deux autres personnes d'origine marocaine et algérienne, Mme C... ou Mme D... a dit « tiens, le Maghreb est au café » ; que par courriel en date du 25 octobre 2012, Mme Z... a rappelé à Mme A... que le 22 octobre 2012 à 11 heures 40, elle lui avait fait part de sa décision d'effectuer auprès de Mme D... une demande d'explications écrites afin d'éclaircir les faits en question et qu'elle lui avait également demandé de ne pas en parler à cette dernière ; qu'elle a précisé qu'elle avait également rencontré les protagonistes en présence de M. E... et qu'en fonction des éclaircissements qui lui seraient fournis dans la réponse à la demande d'explications éc1ites, elle prendrait, avec la direction des achats, les dispositions nécessaires conformément au chapitre 9 du statut applicable en matière de garanties disciplinaires ; que pour sa part, M. Charles X... vise la pièce n° 6...

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