Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 24 mai 2018, 17-18.918, Publié au bulletin

Presiding JudgeMme Mouillard
ECLIECLI:FR:CCASS:2018:CO00447
Case OutcomeCassation
Docket Number17-18918
Subject MatterLOIS ET REGLEMENTS - Application immédiate - Cas - Loi nouvelle plus douce - Applications diverses - Loi modifiant dans un sens moins sévère les conditions de l'interdiction de gérer
Appeal Number41800447
Date24 mai 2018
CounselSCP Sevaux et Mathonnet
CourtChambre Commerciale, Financière et Économique (Cour de Cassation de France)
Publication au Gazette officielBull. 2018, IV, n° 62
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :

Vu le principe de nécessité des peines reconnu par l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, ensemble l'article L. 653-8, alinéa 3, du code de commerce dans sa rédaction issue de la loi du 6 août 2015 ;

Attendu que le respect du principe constitutionnel susvisé, dont découle la règle de l'application immédiate de la loi pénale plus douce, commande que, lorsque le juge civil est amené à prononcer une sanction ayant le caractère d'une punition telle que l'interdiction de gérer prévue par l'article L. 653-8 du code de commerce, la loi nouvelle moins sévère reçoive application aux procédures collectives en cours ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 31 octobre 2013, un tribunal de commerce a, sur déclaration de cessation des paiements, ouvert la liquidation judiciaire de la société Ibex ingénierie informatique (la société Ibex) et fixé la date de cessation des paiements au 31 mai 2013 ; que le 18 mars 2014, le tribunal a, sur assignation de deux salariés, prononcé la liquidation judiciaire de la société Clessi, la date de cessation des paiements étant fixée au 27 septembre 2013 ; qu'estimant que les liquidations judiciaires de ces deux sociétés, dirigées par M. X..., avaient mis en évidence des fautes de gestion de la part de ce dernier, le procureur de la République a saisi le tribunal d'une demande de sanctions, lequel a condamné M. X... à une interdiction de gérer pour une durée de trois ans ;

Attendu que pour confirmer le jugement, l'arrêt retient que le défaut de déclaration de la cessation des paiements dans le délai légal de quarante-cinq jours, susceptible de constituer une faute de gestion, s'apprécie au regard de la seule date de cessation des paiements fixée dans le jugement d'ouverture ou dans un jugement de report, que le tribunal a fixé la date de cessation des paiements des sociétés Ibex et Clessi respectivement au 31 mai et 27 septembre 2013 et qu'en déclarant la cessation des paiements de la société Ibex le 26 juillet 2013 et en l'absence de déclaration de cessation des paiements de la société Clessi qui a été liquidée sur assignation de deux salariés, M. X... n'a pas respecté le délai de quarante-cinq jours ; qu'il retient encore que les sanctions pénales, d'une part, et les sanctions pécuniaires et personnelles qui peuvent être prononcées par les juridictions civiles ou commerciales dans le cadre des procédures collectives, d'autre part, sont de nature différente et qu'à défaut de disposition spécifique de la loi du 6 août 2015 rendant la modification de l'article L. 653-8, qui sanctionne désormais d'une mesure d'interdiction de gérer celui qui a omis sciemment de demander l'ouverture d'une procédure collective dans le délai de quarante-cinq jours à compter de la cessation des paiements, le nouveau texte n'est applicable qu'aux procédures collectives ouvertes après le 8 août 2015 ; qu'il retient enfin que tel n'étant pas le cas des procédures collectives des sociétés Ibex et Clessi, il n'y a pas lieu de rechercher si la cessation des paiements avait été sciemment déclarée tardivement par M. X... ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'en ce qu'elle exige dorénavant, pour l'application de la sanction de l'interdiction de gérer, que l'omission de la demande d'ouverture d'une procédure collective dans les quarante-cinq jours de la cessation des paiements soit faite sciemment, la loi du 6 août 2015 a modifié, dans un sens moins sévère, les conditions de la sanction de sorte que cette loi devait être appliquée à la situation de M. X..., la cour d'appel a violé le principe et le texte susvisés ;

Et attendu que la condamnation à l'interdiction de gérer ayant été prononcée en considération de plusieurs fautes, la cassation encourue à raison de l'une d'entre elles entraîne, en application du principe de proportionnalité, la cassation de l'arrêt ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 mars 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;

Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mai deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt.

Moyens produits par la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat aux Conseils, pour M. X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir condamné monsieur X... à une interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler directement ou indirectement...

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