Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 12 juillet 2018, 16-26.844, Publié au bulletin

Presiding JudgeM. Frouin (président)
ECLIECLI:FR:CCASS:2018:SO01337
Case OutcomeCassation sans renvoi
CounselSCP Gatineau et Fattaccini,SCP Lyon-Caen et Thiriez,SCP Thouvenin,Coudray et Grévy
Subject MatterSTATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions et accords collectifs - Accords collectifs - Accords particuliers - Accord du 10 juillet 2013 portant sur la sécurisation des parcours professionnels des salariés intérimaires - Accord instituant un contrat à durée indéterminée intérimaire - Compétence pour négocier - Partenaires sociaux (non)
Appeal Number51801337
Date12 juillet 2018
CourtChambre Sociale (Cour de Cassation de France)
Publication au Gazette officielBull. 2018, V, n° 145.
Docket Number16-26844
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique :

Vu l'article 34 de la Constitution du 4 octobre 1958 ;

Attendu qu'il est loisible au législateur, après avoir défini les droits et obligations touchant aux conditions et aux relations de travail, de laisser aux employeurs et aux salariés, ou à leurs organisations représentatives, le soin de préciser, notamment par la voie de la négociation collective, les modalités concrètes d'application des normes qu'il édicte ;

Attendu, selon le jugement attaqué rendu en dernier ressort, que le syndicat Prism'emploi, la fédération CFDT services, la fédération CFTC commerce, services et force vente (CFTC CSFV) et la Fédération nationale de l'encadrement du commerce et des services CFE-CGC (FNECS CFE-CGC) ont, le 10 juillet 2013, conclu un accord de branche portant sur la sécurisation des parcours professionnels des salariés intérimaires, et prévoyant la possibilité, pour les entreprises de travail temporaire, de conclure avec certains de leurs salariés intérimaires un contrat de travail à durée indéterminée intérimaire couvrant l'exécution de l'ensemble des missions qui leur sont confiées, ainsi que les périodes « d'intermission », pendant lesquelles les intéressés demeurent disponibles pour l'exécution de nouvelles missions et perçoivent une garantie minimale de rémunération ; que cet accord a fait l'objet d'un arrêté d'extension du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social du 22 février 2014 ; que, saisi d'un recours en excès de pouvoir à l'encontre de l'arrêté d'extension du 22 février 2014, le Conseil d'Etat a, par arrêt du 27 juillet 2015, sursis à statuer jusqu'à ce que le tribunal de grande instance de Paris se soit prononcé sur le point de savoir si les parties à l'accord du 10 juillet 2013 avaient compétence pour prévoir la conclusion d'un contrat à durée indéterminée pour l'exécution de missions de travail temporaire ;

Attendu que pour dire que les organisations en cause avaient compétence pour négocier l'ensemble des éléments constitutifs de l'accord collectif de branche conclu le 10 juillet 2013, le jugement retient que le champ normatif de l'accord n'excède pas en soi la limite fixée à l'article 34 de la Constitution du 4 octobre 1958 concernant notamment les principes fondamentaux du droit du travail relevant de la compétence d'attribution réservée au législateur, que les modalités particulières du contrat à durée indéterminée intérimaire ne font, en définitive, que décliner des obligations civiles préexistantes, qui par définition peuvent donc ne pas être strictement identiques à celles d'un contrat à durée indéterminée de droit commun ou des contrats de missions temporaires jusqu'ici pratiqués et qui relèvent d'un champ conventionnel bénéficiant d'une certaine liberté en complément ou en supplément de la loi, ce d'autant que la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 a prévu, dans son article 56, des conditions d'expérimentation de ce même régime de contrat de travail à durée indéterminée intérimaire ;

Qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants tirés de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015, laquelle ne dispose que pour l'avenir, et alors que l'accord collectif du 10 juillet 2013, en instaurant le contrat à durée indéterminée intérimaire permettant aux entreprises de travail temporaire d'engager, pour une durée indéterminée, certains travailleurs intérimaires, crée une catégorie nouvelle de contrat de travail, dérogeant aux règles d'ordre public absolu qui régissent, d'une part, le contrat de travail à durée indéterminée, d'autre part le contrat de mission, et fixe, en conséquence, des règles qui relèvent de la loi, le tribunal de grande instance a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 15 novembre 2016, entre les parties, par le tribunal de grande instance de Paris ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Dit que les parties à l'accord du 10 juillet 2013 portant sur la sécurisation des parcours professionnels des salariés intérimaires n'avaient pas compétence pour prévoir la conclusion d'un contrat à durée indéterminée pour l'exécution de missions de travail temporaire ;

Condamne le syndicat Prism'emploi aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne le syndicat Prism'emploi à payer à la Confédération générale du travail Force ouvrière (CGT FO) et à la Fédération des employés et cadres Force ouvrière (FEC FO) la somme globale de 3 000 euros et rejette les autres demandes ;

Ordonne la notification de la présente décision au Conseil d'Etat, à titre de réponse à sa question préjudicielle formulée au visa de l'article R. 771-2 du code de la justice administrative dans son arrêt n° 379677 du 27 juillet 2015 ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la Confédération générale du travail Force ouvrière et la Fédération des employés et cadres Force ouvrière.

Il est fait grief au jugement attaqué d'avoir dit que l'organisation syndicale patronale PRISM'EMPLOI ainsi que la Fédération Nationale de l'Encadrement du Commerce et des Services (FNECS) CFE-CGC, la Fédération CFTC Commerces, Services et Forces de Ventes (CSFV) et la Fédération des Services (FS) CFDT avaient compétence pour négocier l'ensemble des éléments constitutifs de l'accord collectif de branche intitulé Accord portant sur la sécurisation des parcours professionnels des salariés intérimaires, conclu le 10 juillet 2013, d'avoir rejeté les demandes formées au titre de l'article 700 par la Confédération Générale du Travail Force Ouvrière (CGT-FO) et la Fédération des Employés et Cadres Force Ouvrière et d'avoir condamné ces organisations syndicales aux entiers dépens de l'instance ;

AUX MOTIFS QUE « Attendu que l'accord collectif de branche litigieux du 10 juillet 2013 intitulé ACCORD PORTANT SUR LA SECURISATION DES PARCOURS PROFESSIONNELS DES SALARIES INTERIMAIRES, basé sur l'Accord national interprofessionel (ANI) du 11 janvier 2013 et ayant fait l'objet d'une extension assortie de certaines réserves par arrêté du 22 février 2014 du Ministre du travail après avis favorables des 11 décembre 2013 et 28 janvier 2014 de la Commission nationale de la négociation collective, prévoit notamment la...

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