Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 27 mai 2015, 12-21.361, Publié au bulletin

Presiding JudgeMme Mouillard
ECLIECLI:FR:CCASS:2015:CO00513
Case OutcomeRejet
CounselSCP Piwnica et Molinié,SCP Vincent et Ohl
Date27 mai 2015
Appeal Number41500513
Docket Number12-21361
Subject MatterBOURSE - Autorité des marchés financiers - Pouvoirs - Contrôles et enquêtes - Procès-verbal d'audition volontaire relatif à un dossier clos - Pouvoirs du président de la commission des sanctions - Détermination
CourtChambre Commerciale, Financière et Économique (Cour de Cassation de France)
Publication au Gazette officielBulletin 2015 n°5,IV, n°86

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 31 mai 2012), qu'entre décembre 2006 et juin 2007, la société Wendel, ayant M. X... pour président du directoire, a conclu avec quatre établissements de crédit (les banques) des contrats de « Total Return Swaps » (TRS) ayant pour actif sous-jacent les actions de la société Saint-Gobain et dont le dénouement pouvait intervenir au terme prévu ou par anticipation, à l'initiative de la société Wendel ; que ces contrats, définissant des obligations réciproques exclusivement monétaires, conféraient à cette dernière une exposition économique à Saint-Gobain ; que pour constituer leur couverture, les banques ont acquis un total de 85 millions de titres Saint-Gobain ; que, parallèlement à la conclusion des TRS, la société Wendel a obtenu des banques et d'un autre établissement de crédit des concours financiers d'un montant total proche de celui des TRS ; qu'ayant décidé, le 3 septembre 2007, de dénouer progressivement les TRS, la société Wendel, qui avait acquis, entre cette date et le 27 novembre 2007, plus de 66 millions d'actions représentant 17, 6 % du capital de la société Saint-Gobain, a successivement déclaré à l'AMF, entre le 26 septembre 2007 et le 26 mars 2008, le franchissement des seuils de 5 %, 10 %, 15 % et 20 % du capital de Saint-Gobain ; que faisant notamment valoir que, si le directoire de la société Wendel avait officiellement pris la décision de transformer l'exposition économique à Saint-Gobain en détention physique de titres de cette dernière société le 3 septembre 2007, les éléments contenus dans le rapport d'enquête et la concomitance entre la signature des contrats de TRS et l'obtention, par la société Wendel, de financements lui permettant, à terme, d'acquérir les titres Saint-Gobain cédés par les banques dans le cadre du dénouement des TRS, avaient montré qu'une volonté de prise de participation significative dans le capital de la société Saint-Gobain existait dès l'origine et que c'est à cette fin que cette opération avait été mise en place, l'Autorité des marchés financiers (l'AMF) a reproché à la société Wendel et à M. X..., sur le fondement de l'article 223-6 de son règlement général, de ne pas avoir porté à la connaissance du public les principales caractéristiques de « l'opération financière » préparée par la société Wendel et « destinée à lui permettre d'acquérir une participation significative dans le capital de la société Saint-Gobain », « au plus tard le 21 juin 2007, date à laquelle l'ensemble des TRS avaient été conclus avec les établissements bancaires » et, sur le fondement de l'article 223-2 du même règlement, de ne pas avoir porté à la connaissance du public, avant d'être soumise à l'obligation de déclaration de franchissement à la hausse du seuil de 5 %, l'information privilégiée ayant consisté en la « mise en place, par la société Wendel, de l'opération sus décrite, afin de pouvoir prendre une participation substantielle dans le capital de la société Saint-Gobain » ; que par décision du 13 décembre 2010, la commission des sanctions de l'AMF a retenu que chacun de ces griefs était établi, a prononcé une sanction pécuniaire à l'encontre de la société Wendel et de M. X... et a ordonné la publication de sa décision ; que, par arrêt du 26 novembre 2013, la Cour de cassation a sursis à statuer sur le pourvoi formé par M. X... contre l'arrêt ayant rejeté son recours et interrogé à titre préjudiciel la Cour de justice de l'Union européenne ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter son recours alors, selon le moyen :

1°/ que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement ; que le droit à un procès équitable emporte le respect de la loyauté de la procédure ; qu'il ressort des articles L. 621-9-1, L. 621-10, R. 621-32, R. 621-34 et R. 621-35 du code monétaire et financier que les enquêteurs de l'AMF ne peuvent entendre une personne susceptible de leur fournir des informations que dans le cadre des enquêtes pour lesquelles ils ont un ordre de mission du secrétaire général de l'AMF ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que M. Y..., directeur des enquêtes de l'AMF et M. Z..., enquêteur ayant dirigé l'enquête sur les conditions de la montée au capital de la société Saint-Gobain par la société Wendel avaient procédé à l'audition de M. A... hors tout ordre de mission, le 26 novembre 2010 alors que l'enquête était close depuis le 6 avril 2009 ; qu'en énonçant néanmoins, pour rejeter la demande en annulation de la décision présentée par M. X..., que cette audition, la transmission du procès-verbal d'audition au président de la commission des sanctions puis la décision de ce dernier de ne pas écarter des débats le procès-verbal d'audition n'étaient pas irrégulières dès lors qu'aucun texte et plus généralement aucun principe n'interdisait au directeur de la DESM dans ces circonstances particulières de prendre l'initiative, même si l'enquête et l'instruction étaient closes, de recueillir dans un procès-verbal d'audition volontaire les déclarations de l'intéressé et de transmettre aussitôt cet acte au président de la commission des sanctions, la cour d'appel a violé les textes susvisés, ensemble le principe de loyauté de la procédure ;


2°/ que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement ; que le droit à un procès équitable impose le respect d'une contradiction effective ; que le décret du 8 décembre 2010, modifiant les articles R. 621-38, R. 621-39 et R. 621-40 du code monétaire et financier, a prévu la communication à « un membre du Collège ayant examiné le rapport d'enquête ou de contrôle et pris part à la décision d'ouverture d'une procédure de sanction » du rapport et des observations écrites des mis en cause et la possibilité d'y « répondre par écrit », cette réponse étant communiquée aux personnes mises en cause ; que s'agissant de l'audience devant la commission des sanctions, le décret indique que le membre du collège ou son représentant peut « présenter des observations au soutien des griefs notifiés et proposer une sanction », ce qui exclut toute communication d'observations écrites non communiquées préalablement aux mis en cause ; qu'en énonçant néanmoins, pour rejeter le recours en annulation de la décision de la commission des sanctions, qu'aucun texte n'impose au représentant d'informer les mis en cause, préalablement à la séance de la commission des sanctions, de la teneur de ses futures observations, ni même, en cas d'observations écrites, de les leur remettre en début de séance, la cour d'appel a violé les articles R. 621-38, R. 621-39 et R. 621-40 du code monétaire et financier, ensemble les articles 6 § 1 et 6 § 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le principe de la contradiction ;

3°/ que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement ; que le droit à un procès équitable implique le respect d'une contradiction effective, de la loyauté de la procédure et du principe de l'égalité des armes ; qu'en l'espèce, M. X... faisait valoir, à l'appui de sa demande d'annulation de la décision prise par la commission des sanctions à son encontre, qu'il n'avait découvert que lors de l'audience de la commission que le procès-verbal de l'audition de M. A... avait été transmis au Collège de l'AMF, lors de la réunion au cours de laquelle ce dernier avait donné des instructions à son représentant quant au sens de ses observations, observations écrites de dix pages dont il n'avait eu communication que le jour de l'audience ; qu'en se bornant, pour dire que l'intervention du représentant du Collège n'avait pas été réalisée dans des conditions portant atteinte aux droits de la défense, qu'il importait peu que le Collège ait pris position sur les instructions à donner à son représentant en ayant connaissance des déclarations de M. A... mais pas des observations du requérant et qu'aucun texte n'impose au représentant d'informer les mis en cause, préalablement à la séance de la commission des sanctions, de la teneur de ses futures observations, ni même, en cas d'observations écrites de les leur remettre en début de séance, sans rechercher s'il ne ressortait pas de l'ignorance dans laquelle avait été maintenu M. X... jusqu'aux cours des débats lors de l'audience de la commission des sanctions, des circonstances dans lesquelles le Collège avait donné ses instructions à son représentant ainsi que la teneur des observations, une atteinte à la loyauté de la procédure, ensemble aux principes du contradictoire et de l'égalité des armes, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 6 § 1 et 6 § 3 24 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir relevé que l'ancien directeur juridique de la société Wendel avait pris l'initiative de se présenter dans les locaux de l'AMF, le 26 novembre 2010, en manifestant la volonté d'effectuer spontanément des déclarations en relation avec le dossier concernant cette société et M. X..., l'arrêt retient exactement qu'aucun texte ou principe n'interdisaient au directeur des enquêtes et de la surveillance des marchés, dans ces circonstances, et même si l'enquête et l'instruction étaient closes, de recueillir dans un « procès-verbal d'audition volontaire » les déclarations de l'intéressé, puis de transmettre aussitôt cet acte au président de la commission des sanctions à qui, en l'état de la procédure, il revenait d'apprécier, dans le respect du principe du contradictoire et des droits de la défense, la suite à donner à cette démarche ;

Et attendu, en second lieu, qu'après avoir relevé, par motifs propres et adoptés, que lors de la séance de la commission des sanctions, le représentant du collège avait remis aux mis en cause et à leurs conseils ainsi qu'aux membres de la commission, le...

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