Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 2 avril 2014, 13-80.474, Publié au bulletin

Presiding JudgeMme Nocquet (conseiller doyen faisant fonction de président)
ECLIECLI:FR:CCASS:2014:CR01515
Case OutcomeRejet
Date02 avril 2014
Appeal NumberC1401515
CitationSur le n° 1 : Sur l'effet d'un classement sans suite prononcé par le ministère public près une juridiction étrangère concernant un crime ou un délit commis hors le territoire de la République par un étranger au préjudice d'une victime française, à rapprocher :Crim., 12 mai 2009, pourvoi n° 07-85.875, Bull. crim. 2009, n° 89 (rejet), et l'arrêt cité. Sur le n° 2 : Sur le défaut de qualité de l'extradé pour se prévaloir d'une infraction aux règles du droit international en matière d'extradition, à rapprocher :Crim., 4 juin 1964, Bull. crim. 1964, n° 192 (4) (rejet). Sur la recevabilité d'une nouvelle demande en matière d'extradition et de mandat d'arrêt européen, à rapprocher :Crim., 15 mai 2012, pourvoi n° 12-82.775, Bull. crim. 2012, n° 121 (rejet), et les arrêts cités. Sur le n° 3 : Sur l'absence d'incidence directe en droit interne sur les décisions de juridictions nationales des arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme, dans le même sens que :Crim., 4 mai 1994, pourvoi n° 93-84.547, Bull. crim. 1994, n° 166 (rejet). Sur l'absence d'influence sur la situation du condamné du pourvoi dans l'intérêt de la loi, à rapprocher :Crim., 11 juillet 1990, pourvoi n° 89-86.483, Bull. crim. 1990, n° 280 (3) (cassation sans renvoi), et l'arrêt cité ;Crim., 31 mars 1999, pourvoi n° 99-84.460, Bull. crim. 1999, n° 68 (2) (cassation partielle sans renvoi) ;Crim., 15 décembre 1999, pourvoi n° 99-84.099, Bull. crim. 1999, n° 308 (2) (cassation sans renvoi). Sur le n° 4 : Sur l'absence d'influence sur l'exercice de l'action publique et l'application de la loi pénale des modalités du retour en France d'une personne poursuivie pour un crime ou délit commis à l'étranger, à rapprocher :Crim., 21 février 1995, pourvoi n° 94-85.626, Bull. crim. 1995, n° 74 (rejet), et les arrêts cités
CounselSCP Waquet,Farge et Hazan,SCP Capron
Docket Number13-80474
Subject MatterCONVENTIONS INTERNATIONALES - Convention d'application de l'accord de Schengen du 19 juin 1990 - Crimes ou délits commis à l'étranger - Victime française - Poursuite en France - Décision de classement sans suite prononcée à l'étranger - Autorité de la chose jugée (non) CHOSE JUGEE - Crime ou délit commis à l'étranger - Victime française - Décisions susceptibles - Décisions d'une juridiction étrangère - Décision définitive statuant sur les mêmes faits - Décision définitive constatant l'extinction de l'action publique - Autorité de la chose jugée
CourtChambre Criminelle (Cour de Cassation de France)
Publication au Gazette officielBulletin criminel 2014, n° 101
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Dieter X...,

contre l'arrêt de la cour d'assises du VAL-DE-MARNE, en date du 20 décembre 2012, qui, pour violences aggravées ayant entraîné la mort sans intention de la donner, l'a condamné à quinze ans de réclusion criminelle, ainsi que contre l'arrêt du même jour par lequel la cour a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 26 février 2014 où étaient présents : Mme Nocquet, conseiller doyen faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Moreau, conseiller rapporteur, Mme Ract-Madoux, MM. Bayet, Moignard, Raybaud, Mmes de la Lance, Chaubon, MM. Germain, Sadot, conseillers de la chambre, M. Laurent, Mme Carbonaro, MM. Azema, Beghin, conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Le Baut ;

Greffier de chambre : Mme Téplier ;

Sur le rapport de M. le conseiller MOREAU, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, de la société civile professionnelle YVES et BLAISE CAPRON, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LE BAUT, Me CAPRON et Me WAQUET ayant eu la parole en dernier ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, le 10 juillet 1982, Kalinka Y..., âgée de 14 ans, de nationalité française, a été trouvée morte à Lindau en Allemagne, au domicile de son beau-père, M. X..., de nationalité allemande ; que l'enquête diligentée par le parquet allemand a été classée sans suite ; qu'une information a été ouverte en France du chef d'homicide volontaire, à la suite d'une plainte avec constitution de partie civile de M. André Y..., père de Kalinka ; que, par arrêt du 8 avril 1993, la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris a prononcé la mise en accusation de M. X...du chef de meurtre, l'a renvoyé devant la cour d'assises de Paris et a décerné ordonnance de prise de corps ; que, par arrêt du 9 mars 1995, la cour d'assises l'a condamné par contumace, pour violences aggravées ayant entraîné la mort sans intention de la donner, à quinze ans de réclusion criminelle ; que, par arrêt du 13 février 2001, la Cour européenne des droits de l'homme a dit qu'il y avait eu violation de l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme, lu en combinaison avec l'article 6, § 3, c, ainsi que de l'article 2 du Protocole n° 7 additionnel à ladite Convention ; que la procédure de contumace a été abrogée par la loi du 9 mars 2004 ; que, par arrêt du 10 décembre 2008, la chambre criminelle, saisie par le procureur général près la Cour de cassation sur le fondement de l'article 621 du code de procédure pénale, a cassé et annulé, dans le seul intérêt de la loi et sans renvoi, l'arrêt du 9 mars 1995 ; que M. X..., entendu par les services de police de Mulhouse le 18 octobre 2009 dans le cadre de la procédure diligentée pour les faits d'enlèvement avec séquestration et violences aggravées dont il avait été victime, a reçu notification de l'ordonnance de prise de corps précitée, valant mandat d'arrêt ; qu'il a été placé en détention provisoire par ordonnance du juge des libertés et de la détention du 21 octobre 2009 ; qu'après avoir ordonné un supplément d'information, la cour d'assises de Paris, saisie en application de l'article 379-4 du code de procédure pénale et statuant en première instance par arrêt du 22 octobre 2011, l'a déclaré coupable de violences aggravées ayant entraîné la mort sans intention de la donner et l'a condamné à quinze ans de réclusion criminelle ; que, sur les appels formés par l'accusé et le ministère public, la cour d'assises du Val-de-Marne, par arrêt du 20 décembre 2012, l'a déclaré coupable de violences sur mineur de 15 ans, par personne ayant autorité, ayant entraîné la mort sans intention de la donner, et a prononcé la même peine ;

En cet état ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 50 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 54 de la Convention d'application de l'accord Schengen, 113-9 du code pénal et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, violation du principe non bis in idem ;

" en ce que, par arrêt incident du 17 décembre 2012, la cour a rejeté les conclusions présentées par la défense tendant à la constatation de l'extinction des poursuites ;

" aux motifs que la notion de jugement définitif a été précisée par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), qu'elle a ainsi retenu qu'une décision doit, afin de pouvoir être qualifiée de jugement définitif au sens de l'article 54 de la CAAS, mettre fin aux poursuites pénales et éteindre l'action publique d'une manière définitive (arrêt du 22 décembre 2008) ; qu'en droit interne, la chambre criminelle de la Cour de cassation a procédé à une appréciation similaire du champ d'application du principe " non bis in idem ", en décidant " qu'il résulte des dispositions des articles 113-9 du code pénal et 54 de la CAAS que, lorsque la victime est de nationalité française au moment de l'infraction, un étranger ayant commis hors du territoire de la République un crime ou délit puni d'emprisonnement, ne peut échapper à toute poursuite en France que s'il justifie avoir été définitivement jugé à l'étranger pour les mêmes faits ; qu'un classement sans suite par le ministère public près d'une juridiction étrangère n'a pas valeur de jugement définitif au sens des textes précités " (arrêt du 6 décembre 2005) ; qu'elle a encore décidé qu'une décision de classement sans suite prise par le parquet sur le fondement de l'article 170, alinéa 2, du code de procédure pénale allemand ne constitue en rien un jugement définitif au sens de la jurisprudence de la CJUE (arrêt du 12 mai 2009) ; qu'au cas d'espèce, qu'il est constant que plusieurs classements sans suite émanant du parquet de Kempten et du procureur général près la cour d'appel de Munich sont intervenus ; que la décision invoquée est celle du tribunal supérieur régional de Munich, en date du 9 septembre 1987, dont les principaux motifs sont les suivants : « la demande de décision judiciaire dans le cadre d'une action avec constitution départie civile est irrecevable étant donné que, contrairement à l'article 172, alinéa 3, phrase 1 du code de procédure pénale, elle ne définit pas de façon suffisante les faits sensés motiver l'introduction d'une action publique et n'indique pas d'élément de preuve de la manière requise, conformément à la législation, il est nécessaire que les faits soient présentés de manière concise, avec preuves à l'appui et compréhensibles, et permettent au tribunal d'examiner la requête sans faire appel au dossier d'enquête ni à d'autres pièces. Des éléments de preuve devant justifier, dans le cadre de l'exposé du demandeur, de manière suffisante, la présomption du délit, font défaut au niveau des faits et des circonstances invoquées (...) ; l'action avec constitution de partie civile ne répond pas à ces exigences (...) à supposer que la requête de décision judiciaire dans le cadre de l'action avec constitution de partie civile réponde à la forme prescrite par l'article 172, alinéa 3, phrase 1, du code de procédure pénale et soit recevable, elle aurait en tout état de cause dû être rejetée pour irrecevabilité, en raison de l'insuffisance des motifs permettant d'intenter l'action publique contre l'inculpé (article 174 alinéa 1), » ; qu'il se déduit des termes utilisés que le tribunal supérieur régional de Munich, en se prononçant sur le contenu des éléments présentés par le requérant, n'a pas pour autant procédé à un examen des charges susceptibles de peser à l'encontre de M. X...; qu'il ressort de la motivation même de cette décision qu'au jour de l'examen de la requête d'action publique n'avait pas été engagée ; que, compte tenu de ces éléments, la décision du 9 septembre 1987 du tribunal Supérieur Régional de Munich, qui n'a fait que rejeter comme irrecevable la requête de la partie civile M. Y..., ne peut aucunement s'analyser comme un jugement définitif au sens des articles 54 de la CAAS et 113-9 du code pénal ; qu'elle a été d'ailleurs lue comme tel par différentes autorités ou juridictions ; qu'il y a lieu de rappeler en effet, d'une part, que la défense de M. X...a déjà invoqué la règle " non bis in idem " dans le cadre du pourvoi formé contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris du 8 avril 1993 le renvoyant devant la cour d'assises pour des faits qualifiés de meurtre et que ce moyen a été déclaré irrecevable par arrêt du 21 septembre 1993 ; que, d'autre part, la Cour européenne des droits de l'homme, saisie par la requête de M. X..., en date du 29 novembre 1995, à la suite de l'arrêt par contumace de la cour d'assises du 9 mars 19S5 a, dans sa décision sur la recevabilité...

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