Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 20 février 2008, 02-82.676 07-82.110, Publié au bulletin

Presiding JudgeM. Cotte
Case OutcomeRejet
CounselSCP Piwnica et Molinié,SCP Waquet,Farge et Hazan,SCP Thomas-Raquin et Bénabent
Docket Number07-82110,02-82676
Appeal NumberC0800849
Date20 février 2008
Subject MatterINSTRUCTION - Incompatibilités - Juge d'instruction ayant effectué des actes de poursuites pour des faits distincts dans une procédure antérieure, visant les mêmes personnes, pour des infractions similaires (non)
CourtChambre Criminelle (Cour de Cassation de France)
Publication au Gazette officielBulletin criminel 2008 N° 44 p. 167

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :

-X... Michel,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 3e section, en date du 20 mars 2002, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de complicité et recel de corruption, a prononcé sur ses demandes d'annulation de pièces de la procédure ;

-X... Michel,
-FF... François,
- D... Jean-Pierre,
-Y... Louise-Yvonne, épouse Z...,
-A... Jean-Pierre,
-B... François,
-C... Alain, partie civile,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, 9ème chambre, en date du 27 février 2007, qui a condamné
-Michel X..., pour complicité de corruption, à quatre ans d'emprisonnement avec sursis,80 000 euros d'amende, quatre ans d'interdiction du droit de vote et d'éligibilité,
-François FF..., pour recel et usage de faux, à trois ans d'emprisonnement dont deux ans avec sursis,50 000 euros d'amende, cinq ans d'interdiction du droit de vote et d'éligibilité,
-Jean-Pierre D..., pour usage de faux et recel, à dix mois d'emprisonnement avec sursis,10 000 euros d'amende,
-Louise-Yvonne Z..., pour complicité de corruption et de trafic d'influence, recel, à deux ans d'emprisonnement avec sursis,30 000 euros d'amende, trois ans d'interdiction du droit de vote et d'éligibilité,
-Jean-Pierre A..., pour participation frauduleuse à une entente prohibée, à dix mois d'emprisonnement avec sursis,20 000 euros d'amende,
-François B..., pour participation frauduleuse à une entente prohibée et corruption, à quinze mois d'emprisonnement avec sursis,60 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 6 février 2008 où étaient présents : M. Cotte président, M. Rognon conseiller rapporteur, M. Dulin, Mmes Thin, Desgrange, M. Bayet, Mme Canivet-Beuzit, M. Finidori conseillers de la chambre, Mmes Slove, Degorce, Labrousse conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Mouton ;

Greffier de chambre : M. Souchon ;

Sur le rapport de M. le conseiller ROGNON, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, de la société civile professionnelle THOMAS-RAQUIN et BÉNABENT et de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIÉ, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MOUTON ; les avocats des parties ayant eu la parole en dernier ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

I. sur le pourvoi de Louise-Yvonne Z... :

Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;

II. sur les autres pourvois :

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Attendu qu'il résulte des arrêts attaqués et des pièces de procédure que l'exécution du programme de construction et de rénovation des lycées entrepris par le conseil régional d'Île-de-France, entre 1989 et 1995, a révélé que les entreprises bénéficiaires des marchés publics, d'un montant global de 23 milliards de francs, s'étaient concertées et avaient obtenu du cabinet de l'exécutif régional et du bureau d'études Patrimoine ingénierie, dirigé par Gilbert F..., assistant à la maîtrise d'ouvrages publics, des informations privilégiées pour aligner leurs offres ; qu'en contrepartie de cette inégalité d'accès, favorisée par un recours systématique à la procédure du marché d'entreprise de travaux publics, permettant des appels d'offres restreints, elles ont versé à des partis politiques et à leurs élus des commissions dissimulées par la facturation de prestations inexistantes ou la rémunération d'emplois fictifs ; qu'en exécution d'un pacte convenu à l'avance, une somme équivalente à 2 % du montant des marchés a été rétrocédée selon une clé de répartition en affectant 1,2 % au Rassemblement pour la République (RPR) et au Parti républicain (PR),0,8 % au Parti socialiste ; que les cadres et dirigeants de ces entreprises ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel des chefs d'abus de confiance ou d'abus de biens sociaux, de corruption et d'ententes illicites pour fausser ou restreindre le jeu de la concurrence, les fonctionnaires territoriaux et le délégataire du conseil régional pour favoritisme et atteinte à la liberté et à l'égalité d'accès dans les marchés publics, enfin, les trésoriers, collecteurs de fonds et élus des partis politiques pour complicité et recel de corruption et de trafic d'influence ;

En cet état :

1°) sur le pourvoi de Michel E... contre l'arrêt du 20 mars 2002 :

Sur le premier moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Waquet, Farge et Hazan, pris de la violation des articles préliminaire, 1er,80,81,170,171,173,174,591 à 593 du code de procédure pénale,6 et 13 de la Convention européenne des droits de l'homme, violation des droits de la défense, du droit à un procès équitable et du principe de l'égalité des armes, insuffisance de motifs, manque de base légale, contradiction de motifs ;

" en ce que l'arrêt attaqué du 20 mars 2002 a rejeté la demande de Michel E... tendant à l'annulation des actes de procédure accomplis par le juge d'instruction G... pour défaut d'impartialité ;

" aux motifs que, " la décision prise par le président du tribunal de grande instance d'adjoindre M. G... au juge d'instruction chargé de l'information constitue un acte d'administration judiciaire dont les parties ne peuvent discuter ni de la régularité ni de l'existence ; qu'il appartenait aux personnes mettant en cause l'impartialité de ce magistrat de solliciter sa récusation pour le renvoi de l'affaire pour suspicion légitime par application des dispositions des articles 662 et 668 du code de procédure pénale ; que Michel E..., mis en examen le 1er décembre 2000, n'a, à aucun moment, mis en oeuvre une telle procédure ; que, dans l'hypothèse où cette procédure aurait été mise en oeuvre et qu'il y aurait été fait droit, les actes accomplis auparavant n'auraient pas été frappés de nullité, mais auraient pu être complétés ou refaits par le nouveau magistrat désigné pour poursuivre les investigations ; que, par ailleurs, ni les dispositions de l'article 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme, lesquelles ne visent que les juges appelés à statuer sur les charges, ni l'exigence d'impartialité, qui s'impose à tous les juges, n'ont pour effet d'interdire en général qu'une procédure d'information soit confiée à un juge d'instruction qui a précédemment exercé l'action publique en tant que représentant du ministère public dans le cadre de poursuites devant une autre juridiction pour des faits différents ayant pu mettre en cause, pour une part, les mêmes personnes ; que contrairement à ce que soutient l'avocat de Michel E... dans sa requête, la procédure d'information suivie à Créteil, dans le cadre de laquelle M. G... a participé à l'exercice de l'action publique, et la présente procédure, ne forment nullement une procédure unique artificiellement scindée mais deux procédures distinctes ; … que la procédure de Créteil … ouverte le 9 février 1994 … portait sur la gestion de logements HLM par l'OPHLM puis l'OPAC de Paris, et non sur celle des lycées de la région d'Ile-de-France, et qu'elle mettait en cause des entreprises différentes ; qu'il apparaît donc que ces faits sont totalement distincts de ceux objet de la présente procédure, la circonstance que les infractions commises soient similaires étant indifférente (…) que la circonstance que certaines personnes ont été mises en examen dans les deux dossiers, tel Michel E..., n'enlève rien au fait qu'il s'agit de deux procédures distinctes dont l'objet diffère ; que par ailleurs la présence, dans les deux procédures, du même magistrat, à Créteil en tant que représentant du ministère public, puis à Paris en tant que juge d'instruction, ne permet aucunement d'induire que ce magistrat a pu, antérieurement à sa nomination à Paris, en qualité de membre du parquet de Créteil et alors qu'aucune information n'était ouverte à Paris, porter une appréciation sur les faits de celle-ci ; qu'au demeurant à aucun moment ce dernier, lorsqu'il représentait le ministère public, n'a porté une appréciation sur le fond même de la poursuite au sens de la Convention européenne des droits de l'homme ; qu'à supposer que la présente procédure fasse l'objet d'un renvoi devant la juridiction correctionnelle, il appartiendra à cette dernière de se prononcer sur le bien ou mal fondé des charges retenues par les magistrats instructeurs ; que la désignation de M. G... dans la présente procédure n'est donc pas critiquable au sens de l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme ; (…) que Michel E... était présenté comme ayant eu un rôle déterminant dans le processus de fraude ; que c'est donc à bon droit que les juges ont souhaité vérifier la réalité des manipulations d'espèces par les personnes en cause, et notamment dans le cadre de la gestion de la ville de Paris " ;

" alors, d'une part, que la défense qui n'use pas des procédures particulières de récusation ou de suspicion légitime conserve le pouvoir de faire constater la nullité des actes de l'information dès lors qu'ils sont effectués par un magistrat ne répondant pas aux conditions objectives d'impartialité exigées par ses fonctions, sa mission et par l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme ; qu'en considérant que seules les procédures de récusation ou de renvoi pour suspicion légitime, au demeurant impropres à entraîner l'annulation des actes irréguliers, pouvaient permettre à Michel E... de faire constater le défaut d'impartialité objective du magistrat instructeur, dont l'intervention en qualité de substitut du procureur de la République dans une affaire connexe est incompatible avec la poursuite d'une instruction à charge et à décharge et devait entraîner la nullité des actes accomplis par ce magistrat, la chambre de l'instruction a violé les articles 6 § 1 et 13 de la Convention précitée ;

" alors, d'autre part, que le principe d'impartialité, tel que consacré par l'article 6 § 1 de la Convention européenne...

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