Cour de cassation, criminelle, Commission de révision, 4 juillet 2013, 11REV111, Publié au bulletin

Presiding JudgeMme Radenne
ECLIECLI:FR:CCASS:2013:C1EV111
Case OutcomeSaisine de la Cour de révision
CourtCOMMISSION_REVISION
Appeal Number11REV111
CitationSur les conditions dans lesquelles la rétractation de la partie civile peut constituer un fait nouveau ou un élément inconnu de la juridiction au jour du procès permettant de demander la révision d'une décision pénale, à rapprocher :Com. rév., 14 décembre 2009, n° 08 REV 085, Bull. crim. 2009, n° 5 (saisine de la Cour de révision), et l'arrêt cité
Date04 juillet 2013
CounselMe Roméo,Me Pelletier,Me Baudoux
Docket Number11REV111
Publication au Gazette officielBulletin criminel 2013, Commission de révision, n° 3

N° 11 REV 111




La Commission de révision des condamnations pénales, en sa séance tenue en chambre du conseil au Palais de Justice, à Paris, le quatre juillet deux mille treize, a rendu la décision suivante ;

Sur le rapport de Madame le conseiller référendaire Proust, les observations de Maîtres Roméo, Pelletier et Baudoux, avocats, et celles de Monsieur l'avocat général Bonnet, à l'audience du 27 mai 2013, en présence de Mme Radenne, présidente, M. Maunand, Mme Moreau, M. Mansion, membres de la Commission, Mme Guénée, greffier, à l'issue de laquelle l'affaire a été mise en délibéré au 4 juillet 2013 ;


SAISINE DE LA COUR DE REVISION et rejet sur les demandes présentées par M. Christian X... et tendant, d'une part, à la révision de l'arrêt de la cour d'assises des Bouches-du-Rhône, en date du 23 février 2011, qui, pour viols et agressions sexuelles aggravés sur mineur de quinze ans, l'a condamné à neuf ans d'emprisonnement et, d'autre part, à la suspension de l'exécution de cette condamnation ;

LA COMMISSION DE REVISION,

Vu les demandes susvisées ;

Vu les mémoires produits ;

Vu les articles 622 et suivants du code de procédure pénale ;

RAPPEL DES FAITS ET PROCEDURE :

- L'instruction initiale et la condamnation

Christian X... a été condamné le 23 février 2011 par la cour d'assises des Bouches-du-Rhône pour viols et agressions sexuelles commis entre 1996 et 1999 sur la personne de son petit-fils Gabriel, né le 21 janvier 1991.

1. Le dossier d'instruction

Le docteur C..., de l'hôpital américain de Reims effectue le 26 juin 2000 un signalement écrit auprès du procureur de la République selon lequel Gabriel X... a révélé des actes de sodomie commis sur lui par son grand-père, sans pouvoir les dater précisément, et que sa marge anale présente deux cicatrices.

Une enquête préliminaire est ouverte puis une instruction le 10 juillet 2000.

Gabriel X... déclare que pendant les grandes vacances qu'il passait chez ses grands-parents avant son entrée en cours préparatoire, alors qu'ils étaient dans la salle de bains, son grand-père avait mis deux fois " son zizi dans ses fesses ", qu'il avait saigné la deuxième fois, et que son grand-père le caressait aussi parfois pendant la sieste, " léchait son zizi " et lui demandait de lui faire la même chose. Il indique avoir peur de son grand-père.

La mère de Gabriel X..., Elizabeth D... divorcée X..., ainsi que son père Philippe X... expliquent chacun que leur fils est agité depuis quelques années et est d'ailleurs suivi par un psychothérapeute ; que le 28 janvier 2000, à l'occasion d'une violente crise, Gabriel avait dit que son grand-père lui " faisait des choses ", et lui touchait le zizi quand il était petit au moment du changement des couches, qu'ils ne l'avaient pas cru, que le comportement de l'enfant était devenu inquiétant en juin, qu'il avait fait une violente crise et avait raconté des faits de fellation et de sodomie commis au cours de l'été 1998, ce qui les avaient décidés à consulter un spécialiste. Ils ajoutent que Gabriel X... manifeste la crainte que son cousin Adrien, âgé de deux ans, soit aussi victime. Ils sont longuement interrogés sur leurs relations respectives avec Christian X... et son épouse, notamment à la suite de l'obtention par ces derniers d'un droit de visite sur Gabriel par décision judiciaire en date du 9 juillet 1997.

La grand-mère maternelle de Gabriel X..., Rose-Mary E... épouse D..., explique que son petit-fils lui a raconté les violences subies, notamment le saignement. Elle soutient qu'il lui a adressé des messages d'alerte qu'elle n'a pas compris, comme le fait que, fin février 2000, Gabriel avait insisté pour visionner la cassette vidéo réalisée par son grand-père le filmant avec son cousin Adrien dans son bain, ou qu'à la même période, il avait fait des difficultés pour un suppositoire ce qu'il ne faisait jamais auparavant.

Christian X... affirme être étranger aux actes de violence sexuelle constatés et impute les déclarations de Gabriel à une profonde perturbation psychologique associée à une manipulation externe. Il insiste sur la tension très forte existant entre son fils Philippe et lui-même, sur la sévérité excessive des parents de Gabriel, ainsi que sur la souffrance de l'enfant face au divorce de ses parents. Il soutient que, par ses accusations, Gabriel tente de les rapprocher.

Fin août 2000, Gabriel X... fait de nouvelles révélations, indiquant qu'un vieux monsieur était présent lorsque son grand-père se livrait à des attouchements, surveillait ce dernier et le touchait aussi parfois.

Un réquisitoire supplétif est délivré. Suite aux descriptions de Gabriel X..., notamment de la voiture dans laquelle circulait le deuxième homme, ainsi que de l'analyse de relevés téléphoniques, Jean-Jacques F... est identifié comme un suspect potentiel et Gabriel X... le reconnaît sur planche photographique.

Jean-Jacques F... nie les faits qui lui sont reprochés.

Gabriel X... maintient ses accusations contre son grand-père et contre Jean-Jacques F... tout le long de l'instruction, notamment lors des confrontations organisées par le juge, au cours desquelles Christian X... et Jean-Jacques F... nient les faits reprochés.

Des contestations ayant été élevées sur la réalité des sodomies subies, plusieurs consultations et expertises médicales sont diligentées, aux conclusions divergentes. Deux experts concluent à l'existence de lésions cicatricielles caractéristiques de sévices de type sodomie, et trois experts considèrent que les cicatrices constatées peuvent aussi être dues à une pathologie médicale ano-rectale.

Les quatre experts ayant examiné Gabriel X..., comme la psychologue l'ayant reçu lors de la dénonciation des faits à l'hôpital et le psychothérapeute ayant suivi Gabriel X... l'année précédant l'instruction concluent à l'absence de tendance à l'affabulation et à la crédibilité des accusations. Les experts relèvent l'existence d'un traumatisme profond consécutif aux faits. L'administrateur ad hoc de Gabriel X... signale une tentative de suicide en juin 2001 ainsi que la survenance régulière de graves crises de nerfs et de cauchemars au cours des années 2002-2003.

Les cinq experts ayant examiné Christian X... concluent à une personnalité narcissique avec un manque d'assurance interne et une façade sûr de lui, des émotions et pulsions sexuelles agressives, mais à l'absence de troubles psychiques et neuro-psychiques.

Par ordonnance du 27 juillet 2006, confirmée par arrêt du 20 décembre 2006, le juge d'instruction ordonne la mise en accusation de Christian X... pour viols et agressions sexuelles aggravés, et de Jean-Jacques F... pour agressions sexuelles aggravées. Les charges essentielles relevées contre Christian X... résultent de ce que : Gabriel X..., après avoir révélé les faits au personnel de l'hôpital, avait réitéré ses accusations devant les enquêteurs, le magistrat instructeur et le mis en examen ; ses révélations avaient été précédées de messages d'alerte ; ses déclarations avaient été confortées par les expertises pratiquées écartant toute manipulation et montrant l'existence d'un syndrome post-traumatique ; les examens médicaux allaient dans le sens de l'accusation, des lésions anales compatibles avec les actes de sodomie allégués ayant été constatées ; les parents de Gabriel X... avaient été longtemps incrédules face aux accusations et ne pouvaient donc les avoir provoquées. Le renvoi de Jean-Jacques F... a été ordonné aux motifs suivants : l'enfant avait réitéré ses accusations tout au long de la procédure et lors de la confrontation ; il l'avait reconnu sur photographie alors qu'il était censé ne l'avoir jamais vu ; de nombreux détails concordaient avec le mode de vie de Jean-Jacques F... ; ce dernier s'était contredit à plusieurs reprises et avait cherché à dissimuler la vérité ; Gabriel X... n'avait pas tendance à l'affabulation.

2. La condamnation

Par arrêt du 12 avril 2009, la cour d'assises des Alpes-Maritimes a déclaré coupable Christian X... des faits reprochés et a définitivement acquitté Jean-Jacques F.... Le procès s'est tenu à huis clos entre le 6 et le 12 avril 2009.

Par arrêt du 23 février 2011, la cour d'assises des Bouches-du-Rhône, statuant en appel, a déclaré Christian X... coupable d'avoir à Vence (06), entre 1996 et 1999, commis deux sodomies ainsi que des caresses manuelles et buccales sur le sexe et les fesses de Gabriel X..., avec les circonstances que les faits ont été commis sur la personne d'un mineur de 15 ans pour être né le 21 janvier 1991, et par un ascendant, en l'espèce le grand-père et l'a condamné à une peine de neuf ans d'emprisonnement. L'audience a eu lieu du 14 au 23 février 2011, à huis clos.

Par arrêt du même jour, la cour a statué sur les intérêts civils et a, notamment, condamné Christian X... à payer la somme de 60 000 euros à titre de dommages-intérêts à Gabriel X....

- La requête en révision

Par requête reçue le 24 novembre 2011, Christian X... a sollicité la révision de sa condamnation, invoquant les rétractations par Gabriel X... de ses accusations, peu après l'arrêt de condamnation, qui seraient confortées par des éléments objectifs, à savoir l'absence d'élément médical corroborant l'existence de sévices sexuels, ainsi que l'absence d'éléments psychologiques et psychiatriques corroborant les accusations initiales. Il sollicite aussi la...

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